Pierre Emmanuel Marie Pérusat dit Jean d’Aurian (1870-1931) fait partie de ces illustrateurs réguliers de la Semaine de Suzette. On retrouve dans son oeuvre, également publiée dans Lisette, Pêle-mêle, Le rire, de nombreuses fables et mini-récits où les animaux sont personnifiés au service d’une morale. Voici l’un de ses récits illustré tiré de la Semaine de Suzette.
LE CACATOIS, LE SINGE ET LA SOURIS
II était une fois un cacatois qui, sur ses vieux jours, s’établit marchand de grains. Sa marchandise était de premier choix et sa clientèle devint nombreuse. Ce qui contribuait le plus à sa renommé, c’étaient de délicieuses noisettes dont, seul, il savait s’approvisionner; aussi de fort loin venait-on en faire l’achat. Tout proche de sa demeure habitait une timide et humble petite souris, très pauvre, que fréquemment il obligeait en lui octroyant quelques-unes de ses bonnes noisettes dont elle se montrait très friande.
Au nombre de ses clients, écureuils des bois d’alentour, poulettes du voisinage, etc., se trouvait un singe nouvellement arrivé dans le pays et qui, mieux que personne, prisait les succulentes noisettes. II connaissait bien le grand sac de toile où le marchand les enfermait, et chaque fois qu’il l’apercevait, ses petits yeux malicieux brillaient de convoitise. Un matin que la petite souris se rendait chez le vieux cacatois, elle trouva celui-ci désespéré!… Pendant la nuit, on lui avait volé son fameux sac de noisettes!… C’était une bonne partie de sa petite fortune!
Alors la souris lui dit:« Écoutez, je soupçonne fort ce vilain singe, votre nouveau client, d’être l’auteur de ce larcin… Je vais m’en assurer, car il habite non loin d’ici.» Et, ce disant, elle partit, toujours courant de ses petites pattes menues. Arrivée chez le singe, elle vit aussitôt le sac volé : le singe commençait a en grignoter le contenu !« Tiens ! dit la souris de son air le plus naïf, vous avez fait des provisions maintenant? ». « Oui, dit l’effronté voleur, je vais essayer du commercer. J’ai acheté ceci à bon compte, et des demain je quitte le pays et vais m’installer beaucoup plus loin. — Mes compliments et bonne chance ! » répliqua la souris en s’éloignant.
Mais, pendant la nuit, s’étant introduite dans la demeure du singe, elle rongea le fond du sac de telle sorte que, seules, quelques minces mailles restaient intactes, puis s’en fut prévenir le pauvre cacatois inconsolable de la perte qu’il venait d’éprouver. De grand matin, la souris et le cacatois se trouvaient prés de l’habitation du voleur. Celui-ci ne tarda pas à sortir son sac sur le dos. « Au voleur!» crièrent les deux amis. Le singe voulut fuir avec son larcin, mais les sauts qu’il fit pour se sauver eurent raison des dernières mailles qui retenaient le fond du fameux sac, et tout le contenu se répandit à terre !… Alors notre faiseur de grimaces crut mourir de rage et de honte. Il précipita sa course et jamais on le revit.
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